1950: Depuis plusieurs années, un petit groupe de spéléos amateurs sous la direction de Max Cosyns se retrouve parmi les lapiaz de la Pierre St Martin aux confins du Pays Basque à la frontière entre Espagne et France. Ils cherchent, avec beaucoup de persévérance, l'entrée d'un réseau souterrain qui les conduirait à travers cet énorme plateau calcaire vers le Gave de Ste Engrace plus de 1000 mètres en aval. La prospection est difficile. Si les cavités sont nombreuses la plupart sont encore bouchées par la neige.
Nous sommes le 31 août, les vacances sont finies et cette année encore nos amis n'ont rien trouvé d'intéressant. Il ne reste là-haut qu'une petite équipe qui s'affaire à démonter le campement. Jacques Labeyrie va faire ses adieux à Jean Thamtham, un des bergers qui passent l'été dans ces alpages. Celui-ci lui parle alors de sa vie de bergers, de la fête des vaches et des couples d'amoureux franco-espagnoles qui vont, après l'office religieux, s’ébattre à l’abri des regards indiscrets dans de petits vallons arborés. Il en montre un à Jacques, qui tout de suite, se dit que ce petit vallon pourrait bien cacher l'entrée d'un gouffre. De retour au camp il croise George Lépineux et Giuseppe Occhialini, dit Beppo, qui partent en balade digestive. Jacques leur indique le petit vallon et va rapidement manger à son tour. A peine terminé il va rejoindre ses compagnons, et les trouve en train de déplacer des pierres pour dégager l'entrée d'un trou. Beppo lui raconte alors qu'assis au bord du vallon George à vu un "choucas" sortir au milieu des blocs. Lépineux en a déduit qu'il y avait quelque chose d’intéressant derrière. Ainsi fut découvert le Puits Lépineux ou Gouffre de la Pierre Saint Martin. L'exploration commencera l'année suivante et ne sera qu'une suite d'aventures palpitantes avec la découverte de salles immenses, de galeries profondes, d'un des plus important réseaux souterrain de la planète, réseau qui n'a pas, 50 ans plus tard, révélé tous ces secrets. Ce sera aussi une aventure tragique avec la mort accidentelle de Marcel Loubens suite à une chute dans la salle Lépineux en 1952.
L'année d'après, en 1953 est découverte la salle de la Verna, qui restera longtemps la plus grande salle souterraine du monde avec ses 3,6 Mm3, par un groupe de spéléos Lyonnais.
En 1956, EDF creuse une galerie jusqu’à la salle de la Verna dans le but d'exploiter l'eau qui circule au fond du gouffre, projet qui ne sera finalement réalisé qu'en 2008. Grâce à cette galerie de 600 m de long désormais la visite de la salle de la Verna est accessible à tous! 2013 voilà 60 ans que La Verna à été découverte et lorsqu’André nous propose d'aller la visiter et refaire le trajet historique des découvreurs nous sautons sur l'occasion.
24 octobre 2013. Avant de pénétrer dans le profondeur du monde souterrain, André nous emmène sur les hauteurs pyrénéennes, faire un petit pèlerinage au col de la Pierre St Martin, la même où Lépineux découvrit la première entrée du gouffre.
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9h00. Après une bonne nuit et un copieux petit déjeuner, nous quittons le gîte de Ste Engrâce pour nous rendre aux locaux de La Verna où nous retrouvons Cédric notre guide. Il nous explique ce que nous allons faire, il nous habille chacun d'une combinaison et nous distribue casques et baudriers. Voilà, nous sommes parés, nous embarquons dans un Land-Rover blanc pour grimper via une excellente, mais étroite, piste vers le ravin d'Arpidia et le tunnel qui nous permettra de rejoindre la salle de la Verna.
On enfile les baudriers, on ajuste les casques, Cédric ouvre la porte et nous voilà partis pour la grande aventure!
Nous voici donc dans ce conduit venté tout juste assez haut pour marcher sans se courber. Cédric nous explique sa construction laborieuse et la découverte du réseau Arpidia
Au bout du tunnel les lumières sont éteintes, nous nous retrouvons en pleine obscurité et le vent tombe! Nous pénétrons dans l'immense salle de la Verna, mais nous n'en distinguons rien! Seul un faible écho nous laisse entendre que nous ne sommes pas dehors!
Nous allumons nos frontales et rejoignons alors la retenue qui alimente en eau la conduite forcée. C'est là que les choses sérieuses commencent. Cédric nous explique comment nous servir de nos longes avant de traverser la rivière sur une cornière métallique. Après avoir franchi ce petit passage délicat, nous pénétrons dans la salle Chevalier. Cette vaste salle de près de 400 m de long pour 50 m de large est encombrée de gros blocs. La progression y est délicate et il nous faudra une bonne demi-heure pour en atteindre l’extrémité.
Le faible niveau de la rivière nous permet de franchir le passage vers la salle Adélie sans nous mouiller. Il nous faut toutefois ôter nos sacs pour une petite séance de reptation acrobatique au dessus de la rivière.
A midi nous quittons la salle Quéffelec par un petit rappel d'une vingtaine de mètres. |
Nous accédons ainsi au "Métro" vaste tunnel que nous parcourons rapidement. Toutefois nous découvrirons dans cette salle quelques jolies concrétions, fistuleuses et de petits cristaux de calcite blancs. Avant de pénétrer dans la salle suivante nous nous accordons une petite pause casse-croute bienvenue!
Dans la salle Loubens nous découvrons de superbes petits gours.
Mais notre esprit est ailleurs, dans quelques minutes nous allons franchir Gibraltar, passage étroit et escarpé entre d'énormes blocs de roche branlants et ainsi accéder à la salle Elisabeth Casteret et la salle Lépineux où s'est jouée la terrible tragédie de 1952!
C'est donc avec beaucoup d'émotions que nous découvrons tout d'abord les vieux bidons contenant la fluorescéine que l'équipe d'exploration a déversée dans les eaux de la rivière St Vincent la veille du drame, puis l'épitaphe de Jacques Labeyrie suivie quelques mètres plus haut par celle de Beppo Occhialini et les restes de la civière abandonnée après la mort de Marcel Loubens.
Il est 13h30 quand nous nous installons pour pique-niquer, nous avons faim. Nous mangeons avidement ce que nous avons emporté, mais le froid nous pénètre rapidement et c'est finalement avec soulagement que nous prenons le chemin du retour! Celui-ci sera plus ludique, Cédric nous sentant plutôt à l'aise nous fait découvrir quelques splendeurs locales, silence et obscurité dans la salle E.Casteret, petit passage au dessus de l'eau et gours de la salle Loubens
Nous sommes bientôt à l'extrémité du Métro, il nous faut remonter sur corde le petit rappel que nous avons descendu ce matin. C'est un exercice auquel nous ne sommes pas habitués, mais avec les conseils de Cédric, les uns collés aux autres pour limiter les conséquences d'une chute de pierres la difficulté est rapidement franchie!
L'aventure se poursuit tranquillement entre concrétions, petites pauses, passage sombres, glissants et quelques problèmes de piles pour la frontale de Sylvain et la mienne.
Nous voilà de retour au passage Adélie avec son petit passage à plat ventre sur la dalle glaiseuse les pieds au dessus de la rivière. Il semblerait d'ailleurs que certains petits petons, à l’insu de leur propriétaire, en ai profiter pour faire un tour dans l'eau claire! Il faut reconnaitre que celle-ci étant si translucide qu'il est parfois difficile de faire la différence entre une pierre émergée et une pierre immergée
Pour rejoindre la salle de la Verna, Cedric nous fait passer par la boite aux lettres le passage historique par où sont passés les scouts lyonnais découvreurs de la fameuse salle. Avant de franchir ce petit toboggan étroit nous découvrons une superbe draperie argileuse!
Nous voilà de retour dans la salle de la Verna, Cédric nous l'éclaire et nous découvrons l'immense sphère dans laquelle nous nous trouvons.
Il nous explique alors sa découverte puis sa formation géologique, nous raconte les trésors d'Aranzadi et des méandres Martine, nous conte l'histoire de l'exploitation de la rivière. Bref nous restons subjuguer pendant une bonne demi-heure!
Puis après un essai de l'interphone de secours, nous reprenons, le cœur un peu gros, le couloir d'accès.
17h50: Nous sommes dehors et nous finissons cette belle aventure par une photo de groupe avant de nous déséquiper. La descente en 4x4 vers Ste Engrace et le retour à la civilisation nous laisse un peu groggy et fatigués par cette dure journée riche en émotions, mais cette aventure sur les traces des découvreurs est unique et mérite d'être vécu. Merci André de nous l'avoir proposée, merci Cédric pour cette belle découverte!